Irene Khan et Maher Arar

Irene Khan, la secrétaire générale du Mouvement, était de passage à l’Université d’Ottawa le 3 novembre. Elle donnait une conférence publique dans le cadre du lancement de son livre The unheard truth, qui sera disponible en français au printemps. Brillante présentation.

J’ai joint Amnistie à cause de son engagement pour l’ensemble des droits humains. La mission comprend désormais de défendre le principe d’interdépendance des droits et nous mettrons autant d’énergie à défendre les droits économiques et sociaux que civils et politiques. Ils sont garants de la dignité humaine. Quel chemin parcouru depuis 2001 où la nouvelles mission a été adoptée. Nous voilà en pleine campagne pour militer sur la santé maternelle, les bidonvilles, la responsabilité des entreprises, …Ce livre m’aide à préciser mon discours auprès de publics qui ne voient pas tous les jours les droits humains dans leur café.

– le droit à un logement, à l’éducation, aux conditions de travail décentes sont des droits tout autant que le droit à la libre expression et à l’égalité ; c’est le droit international qui le dit et le Canada a signé la convention internationale. La déclaration universelle des droits de l’homme d’ailleurs mentionne tous ces droits. En 1948 les États-Unis se souvenaient assez bien des effets dévastateurs de la crise de 29 pour ne pas rechigner à inclure les droits économiques et sociaux dans le texte.

– l’économie ne règle pas tout : les inégalités et la discrimination, le manque de pouvoir et d’expression des personnes exclues, l’insécurité dans lesquelles elles vivent. Car les riches n’ont pas besoin des droits économiques et sociaux.Mais pour les pauvres, le droit à l’égalité est tout aussi à développer que les droits économiques et sociaux.

– la justiciabilité des droits ne règle pas tout : rendre ces droits justiciables sert d’ailleurs plus les classes moyennes que les pauvres. Les droits doivent en fait donner des moyens d’action aux personnes pauvres. On parle d' »empowerement » avant de parler d' »enrichment ». Les droits ne se règlent pas uniquement en cours de justice, mais ils doivent exister dans les pratiques et les politiques.

– les grands gains se sont fait sur la base des droits : le colonialisme, l’émancipation des femmes, la fin de l’apartheid, l’abolition de l’esclavage, le mouvement civique des Noirs, …La lutte à la pauvreté, grave crise des droits humains touchant des milliards de personnes, ne peut se faire que sur la base des droits.

– Amnistie avec sa campagne Exigeons la dignité ne propose pas une autre stratégie, mais invite fortement toutes les autres stratégies – à commencer par les objectifs du Millénaire – à inclure les droits humains. Incontournable.

Ai-je mentionné Maher Arar dans le titre? oui je l’ai rencontré à cette conférence. On a  fait le point sur les éternelles tergiversasions de ce gouvernement pour ne pas mettre en place les recommandations de la commission O’Connor. Toujours pas de mécanisme de surveillance, toujours pas de directives claires sur les agissements des agents de la GRC, SCRS, etc…quand il s’agit de faire du renseignement au détriment du respect des droits humains. Et il me dit que tous les jours c’est difficile car la discrémination se vit tous les jours. Chaque jour.

Droits humains : le leadership du Canada…ou des Canadiens?

Je reviens d’entendre l’excellente présentation de Kenneth Roth de Human Rights Watch sur le manque de leadership du Canada en matière de droits humains. On aurait aimé que le public du Corim soit aussi nombreux à l’écouter que pour Georges Bush, mais faut croire que les droits humains n’attirent pas foule. C’est là mon point. Avec justesse, M. Roth a nommé bon nombre de dossiers où le Canada s’est détourné de son engagement traditionnel envers les droits humains : Omar Khadr, Israël, Colombie, convention sur les bombes à sous-munitions, … Nous le disons nous-mêmes dans nos rapports : où est le Canada? la planète a besoin que ce pays indépendant re-prenne  tout son leadership  sur la scène internationale car il n’y en pas beaucoup d’autres avec ce profil.

Mais si le Canada est peu présent, est-ce aussi parce que les Canadiens sont peu actifs à défendre cette réputation? Le discours sécuritaire a gelé notre entrain traditionnel à défendre les droits. Et est-ce étonnant que même parmi le petit public d’avertis qui a assité à cette conférence, peu de questions sur le leadership du Canada? En fait ce qui est cocasse, c’est que ce soit une représentante du ministère des Affaires étrangères qui rappelle que le Canada est une démocratie et c’est donc à ses citoyens de faire valoir leurs préoccupations. Mais entre « guerre au terrorisme » et « crise économique » , pas facille de pousser du coude pour dire que « hé, ho, et les droits humains alors, vous y pensez? ».

LAB event : l’art actuel au profit d’Amnistie Internationale

Amnistie internationale vous invite à un cocktail artistique le jeudi 19 novembre 2009 de 18h00 à 22h00 au Eastern Bloc un centre dédié à la production et la diffusion des arts médiatiques et interdisciplinaires.

Cet événement d’un jour seulement comporte deux volets qui sauront satisfaire les néophytes aussi bien que les connaisseurs d’art actuel.

Volet 1 : l’art vidéo, discipline artistique d’avant-garde : vous serez bombardé par les œuvres novatrices de This Is Not Design (TIND), Vj MA” et Choco Beets, trois performeurs qui présenteront le fruit de leur recherches respectives sous forme de projection live dans un environnement immersif.

Volet 2 : collectionner l’art actuel : les collectionneurs en herbe pourront acquérir des œuvres contemporaines de jeunes artistes montants à un prix raisonnable ; de plus un reçu de charité sera émis aux acheteurs pour la portion des ventes d’œuvres (50%) qui sera versée à Amnistie. Vous serez ravis par cette exposition rassemblant une quinzaine d’artistes en début de carrière, incluant de jeunes talents représentés en galerie, dont Jean-Sébastien Denis et Julie Ouellet (Simon Blais), Simon Bilodeau et Mike Patten (Art mûr), ainsi que Jason Botkin (Pangée).

GRANDE PRIMEUR

l’artiste de rue Peter Gibson (Roadsworth) présentera pour la première fois des estampes sur toile.

Le coût d’entrée à la porte* :

40.00 $ inclus un reçu de charité de 75%
25.00 $ pour étudiants avec carte valide

* vous pouvez payer comptant ou par chèque, libeller votre paiement à l’ordre de « The Lab Foundation »

Le Eastern Bloc est situé au 7240 Clark, 2e étage près du métro De Castelnau.  Cet événement est présenté par le LAB / Rats de Ville / Chocobeets.

Amnisitie internationale est un mouvement mondial indépendant d’hommes et de femmes qui militent pour le respect des droits humains.

 

 

Lutte contre la pauvreté : l’économie ne règle pas la discrimination

manif 17 octobre 2009

Le 17 octobre marque la journée internationale d’éradication de la pauvreté. Il est crucial de souligner que nous sommes loin d’avoir amélioré le sort de millions de personnes prisonnières de la pauvreté. Il y a de nombreux obstacles, mais ils sont tous à la portée de notre volonté et de nos décisions, puisque ce sont notre volonté et nos décisions qui permettent de tolérer cette situation inadmissible.

L’obstacle le plus couramment nommé est le manque de croissance économique. Avec la croissance, viendrait la prospérité et donc moins de pauvreté.  Certes, des pays ont connu un taux de croissance important et la population en a retiré certains bénéfices. Mais ce n’est pas le cas de nombreux autres pays. Et la conséquence incontestable des dernières décennies de croissance est le creusement des inégalités, flagrantes et indécentes. Car qui dit richesse ne dit pas forcément partage équitable de la richesse,  surtout si les systèmes démocratiques sont défaillants. Mais même les pays dits d’États de droits sont concernés.

Remplir ses obligations en matière de droits économiques et sociaux ne se fait pas simplement par le souhait d’une économie croissante. Il faut une volonté politique pour reconnaître avant tout que ce sont des droits. Le droit au logement est aussi critique à la dignité humaine que le droit de ne pas subir de torture. Les droits économiques et sociaux sont aussi fondamentaux que les droits civils et politiques. Historiquement et idéologiquement, nous vivons pourtant avec cette perception pernicieuse et dangereuse  que les premiers ne sont pas vraiment des droits et de toute manière dépendent de notre richesse économique.  Mais si les droits civils et politiques nous libèrent de la terreur, ce sont bien les droits économiques, sociaux et culturels qui nous libèrent de la misère, comme nous le rappelle le préambule de la Déclaration universelle des droits de l’homme. Il faut mettre autant d’effort pour assurer les obligations minimales en matière de logement, d’éducation, de santé, de conditions de travail décentes, de sécurité sociale que pour assurer des procès justes et équitables, la mise en place de processus démocratiques, l’absence de torture, la liberté d’expression.

Cependant la lutte contre la pauvreté ne passe pas seulement par le respect des droits économiques et sociaux. Ce qui empêche les personnes pauvres de défendre leurs droits relève plus des droits civils et politiques, démontrant encore une fois l’interdépendance des droits. Le manque de liberté d’expression et d’association, la discrimination, l’exclusion et l’insécurité sont des obstacles majeurs à abattre.  Près de trois quarts des pauvres dans le monde  sont des femmes. Leur prise de pouvoir et de parole est essentielle pour faire d’elles des agentes de changement. Mais comment participer aux solutions pour sortir de la pauvreté si personne ne les écoute, ne les respecte? Comment participer quand on est exclue des réseaux sociaux et de pouvoir, quand on vit quotidiennement l’insécurité de forces policières répressives ou de gangs armés?

Cette journée nous donne l’occasion de changer notre regard envers les personnes vivant une situation de pauvreté ; cessons la lutte contre les pauvres !

La croissance économique – surtout si elle adopte les mêmes paradigmes qu’avant la crise – ne règlera pas cet enjeu. C’est à nous de le faire.

Béatrice Vaugrante, directrice générale d’Amnistie internationale Canada francophone

Les droits humains aussi ont des émotions

Béatrice Vaugrante, directrice générale

Bienvenue chez Amnistie au Canada. Les choses bougent beaucoup chez Amnistie. La nouvelle mission nous ouvrant les portes de la défense des droits économiques, sociaux et culturels nous donne tellement d’occasions ici de travailler plus localement, tout en continuant la solidarité internationale. Eh oui, cette année par exemple, on parle en même temps du droit au logement d’une communauté autochtone au Témiscamingue que des évictions forcées en Angola.Mais nous perdons pas notre âme pour autant n’en déplaise aux sceptiques : peine de mort, torture, liberté d’expression seront toujours dans le porte-voix. D’ailleurs c’est bien d’une manque de liberté d’expression dont souffrent aussi les personnes pauvres n’est-ce pas?

Avez-vous remarqué qu’on est plus présents dans les médias? on souhaite vous faire connaître cette équipe diversifiée québécoise, formée du personnel, de milliers de militants et de donateurs convaincus. On a mille occasions à vous offrir pour vous indigner et pour agir. Au plaisir de vous « rencontrer ».

Béatrice Vaugrante